Qu’est-ce que les travaux privatifs d’intérêt collectif en copropriété ?
Définition juridique et loi Elan : que dit la réglementation ?
Des travaux privatifs d’intérêt collectif sont des travaux réalisés sur une partie privative (comme une fenêtre, un radiateur ou une cloison) mais décidés collectivement car ils contribuent à la performance, la sécurité ou l’esthétique de l’immeuble.
La loi Grenelle II puis la loi Elan (2018) ont permis de faciliter le vote de ces travaux. Depuis le 1er juin 2020, ils peuvent être votés en AG sans liste limitative et s’imposent à tous les copropriétaires, même s’ils concernent leurs parties privatives.
Si des travaux affectent une partie privative, le copropriétaire concerné ne peut pas s'y opposer, tant que cela n'altère pas durablement la consistance, l'affectation ou la jouissance de son lot.
En clair : si le projet ne change pas la destination de votre logement (ex. : transformer une chambre en local technique), qu'il ne détruit pas une partie essentielle (mur porteur, accès), et qu'il ne vous prive pas durablement de l'usage de votre bien, il est exécutable.
En revanche, si une autre solution technique existe pour réaliser les mêmes travaux sans toucher à cette partie privative, elle doit être privilégiée, sauf cas de force majeure.
Dans tous les cas, le syndicat de copropriété exerce le rôle de maître d'ouvrage : c'est donc lui qui commande, suit et réceptionne les travaux, même s'ils ont lieu dans un logement privatif.

Exemples de travaux privatifs d’intérêt collectif (TPIC)
- Fenêtres et volets (notamment en simple vitrage)
- Radiateurs ou robinets thermostatiques
- Isolation thermique intérieure
- Systèmes de ventilation (VMC)
- Relamping (remplacement des ampoules par des LED)
Certains travaux, comme la pose d’une VMC systématique en cas d’isolation ou de changement des menuiseries collectifs et / ou privatives, sont désormais courants dans le cadre d’une rénovation globale.
Qui décide des travaux privatifs d’intérêt collectif et comment sont-ils votés ?
Majorité de vote en AG selon le type de travaux
Les travaux d’intérêt collectif peuvent être votés :
- à la majorité absolue (article 25) s’ils concernent des parties privatives :
“Les travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces travaux peuvent comprendre des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.” (loi de 1965). - à la majorité simple (article 24) s’ils concernent les parties communes
- à la double majorité (article 26) pour des cas de transformation ou d’appropriation de parties communes
Opposition possible ? Recours des copropriétaires
Un copropriétaire peut contester :
- Le non-respect du quorum ou de la majorité
- Le défaut d’information (absence de devis, d’étude, etc.)
En revanche, il ne peut pas bloquer les travaux sous prétexte qu’ils touchent à sa partie privative. La loi prévoit même l’obligation de laisser l’accès à son lot.
Cas pratique : changer les fenêtres privatives ou menuiseries privatives en copropriété
Exemple : remplacement des fenêtres dans une rénovation globale
Une copropriété vise un gain de performance de 35 %. Pour l’atteindre, il est nécessaire de remplacer toutes les menuiseries extérieures (MEX), y compris celles situées dans les appartements.
Les travaux sont alors :
- Votés en AG
- Commandés par le syndic (maître d’ouvrage)
- Financés collectivement, souvent via un éco-PTZ collectif
📊 Exemple de financement :
- Fenêtre = 2 000 €
- Financement via éco-PTZ sur 20 ans : 240 mensualités de 8,33 € à taux zéro
Que faire si j’ai déjà changé mes fenêtres ?
Deux possibilités :
- Vos fenêtres sont conformes à la performance visée : vous pouvez demander une exonération avec justificatifs. Dans le cas de travaux énergétiques affectant le gain énergétique du projet, le bureau d’études ou le Maître d’Oeuvre veilleront avec l’AMO que cette information ne bouleverse pas le montage financier.
- Vos fenêtres sont récentes mais non conformes (ex : esthétique non homogène, matériaux différents) : vous pouvez devoir les changer à nouveau.
⚠️ Même un changement de fenêtre à l’identique nécessite une autorisation en copropriété si cela touche l’aspect extérieur.

Travaux privatifs individuels : autorisation, déclaration, conflits
Peut-on changer ses fenêtres seul ?
Oui, si les conditions suivantes sont respectées :
- Respect du règlement de copropriété
- Changement de fenêtre déclaration faite au syndic
- Accord de l’AG si modification de l’aspect extérieur
✉️ Un changement fenêtre bois en PVC sans autorisation ou un remplacement par une porte-fenêtre modifie l’esthétique : vote obligatoire.
Risques en cas de non-respect
- Mise en demeure par le syndic
- Demande de remise en conformité à tes frais
- Action en justice
Financement, aides et répartition des charges
Deux scénarios de financement selon l’objectif
Dans le cadre d’une rénovation globale financée par MaPrimeRénov’ Copropriété et par l’Eco-PTZ, deux cas de figure sont en général possibles :
- Les travaux privatifs d’intérêt collectif sont nécessaires à l’atteinte des 35 % de gain énergétique (critère MaPrimeRénov’ Copropriété) :
- Ils deviennent obligatoires et sont votés dans le cadre de l’AG dans le budget global avec éventuellement une résolution qui précise leur caractère obligatoire. Les copropriétaires ont alors un délai de 2 ans pour réaliser ses travaux (qui seront effectués par l’équipe de MOE et de travaux choisie par la copropriété).
- Le syndic les commande au nom de tous, en tant que maître d’ouvrage.
- Ils sont intégrés au budget global de l’opération.
- Leur absence peut faire perdre l’éligibilité aux aides.
- Les travaux privatifs d’intérêt collectif ne sont pas nécessaires mais cohérents avec la rénovation (ex. remplacement de fenêtres déjà performantes) :
- Ils sont optionnels, votés à part, et financés individuellement.
- Une résolution dans l’AG prévoit leur réalisation et leur commande par les copropriétaires.
- Le syndicat des copropriétaires est le Maître d’Ouvrage. C’est lui, ou le syndic s’il y en a un, qui passe la commande, signe les devis, paie.
- Ils peuvent toujours être commandés par le syndic, permettant aux copropriétaires de bénéficier de l’éco-PTZ (échelonné jusqu’à 20 ans sans intérêts).
- Le syndic appelle les fonds auprès des copropriétaires qui ont passé commande.
- Aucun impact sur l’éligibilité de la copropriété aux aides globales.
📊 Financement des travaux privatifs d’intérêt collectif
Scénario | Description | Caractère des travaux | Avantages | Inconvénients |
---|---|---|---|---|
Travaux nécessaires au gain énergétique | Intégrés au budget global voté en AG | Obligatoires | ✅ Subventionnés via MaPrimeRénov’ Copropriété | ⚠️ Risque d’annulation des aides si tous les travaux ne sont pas réalisés |
Travaux non nécessaires au gain énergétique | Présentés dans un encart d’information ; recensement après AG | Optionnels | ✅ Aucun risque sur les primes globales ✅ Éligibles à l’éco-PTZ individuel | ❌ Non pris en compte dans le calcul des primes collectives |
Quelles aides pour les travaux privatifs d’intérêt collectif ?
- MaPrimeRénov’ Copropriété peut prendre en charge jusqu’à 75 % des travaux, dans la limite de 18 750 € par logement, à condition qu’ils soient votés en AG et intégrés à un projet de rénovation global.
- Éco-PTZ copropriété permet aux copropriétaires de financer les travaux restants sans avance de trésorerie, à condition que le syndic coordonne les commandes.
🛠️ Ces dispositifs s’appliquent même aux travaux dans des parties privatives, dès lors qu’ils sont d’intérêt collectif et coordonnés par le syndic.

Répartition des charges : qui paie quoi ?
- Les travaux dans les parties communes sont répartis selon les tantièmes généraux (ou une clé spécifique du règlement de copropriété).
- Les travaux privatifs d’intérêt collectif (ex : remplacement des fenêtres d’un lot) sont facturés à chaque copropriétaire concerné, selon la réalité des travaux réalisés dans son lot (nombre de fenêtres, mètres linéaires, etc.).
Cas particuliers et précisions utiles
Qu’est-ce qui est privatif ou commun ?
Pour savoir si un élément est privatif ou collectif, il faut se référer :
- Au règlement de copropriété, qui fait foi,
- À l’usage exclusif ou partagé de l'élément concerné,
- À la structure et la destination de l’élément (élément d’usage ou de structure ?).
Voici quelques exemples pour mieux comprendre :
- Fenêtres : le vitrage, les battants et les poignées sont en général privatifs, mais le châssis, les dormants et l’esthétique extérieure peuvent relever des parties communes si cela affecte la façade.
- Volets ou stores : souvent privatifs, sauf si leur uniformité est imposée par le règlement (dans ce cas, ils peuvent être considérés comme relevant d’un intérêt collectif).
- Chaudière à gaz individuelle :
- L’appareil en lui-même, les conduits internes au logement et les réglages sont privatifs ;
- Les colonnes montantes, conduits de fumée communs ou amenées de gaz traversant plusieurs lots sont collectifs.
- Balcons : généralement, la dalle et la structure sont communes, tandis que le revêtement de sol ou les garde-corps peuvent être privatifs s'ils ne modifient pas l’aspect de l’immeuble.
- Gaines techniques : les gaines contenant les réseaux (eau, gaz, électricité, VMC) traversant plusieurs lots sont collectives, même si elles passent dans des parties privatives.
- Planchers bas : ils font souvent partie de la structure porteuse de l’immeuble et sont donc considérés comme parties communes, même s’ils délimitent physiquement deux appartements.

📎 Rappel : des travaux privatifs sont réalisés par et pour un copropriétaire sur sa partie privative ; des travaux collectifs sont votés en AG et concernent des parties communes ou d'intérêt collectif, même si l'intervention a lieu dans un lot privatif.
FAQ
Oui, même un changement de fenêtre à l’identique peut nécessiter une déclaration préalable au syndic. Si l’aspect extérieur est modifié (matériau, couleur, type d’ouverture), un vote en assemblée générale est obligatoire.
Non. Même si vous remplacez une fenêtre bois par une fenêtre PVC, cela modifie l’aspect de la façade. Vous devez obtenir l’accord du syndic et faire voter la résolution en AG.
Le syndic peut vous mettre en demeure. En l’absence de régularisation, la copropriété peut saisir la justice pour vous obliger à remettre les lieux en l’état, à vos frais. Vous risquez aussi de devoir payer des dommages et intérêts.
Uniquement avec l’autorisation de la copropriété. Cela modifie à la fois l’aspect extérieur et la structure du bâtiment. Un vote à la majorité absolue (article 25) est généralement requis.
Non, chaque copropriétaire paie ses propres fenêtres, sauf si un mécanisme de mutualisation a été voté. La répartition des charges se fait selon la réalité des travaux dans votre lot, pas selon les tantièmes.
Vous pouvez demander à être exonéré des travaux votés, à condition de fournir les justificatifs techniques (facture, certificat de performance, etc.). Les travaux doivent avoir été réalisés dans les 5 dernières années et les nouvelles fenêtres doivent atteindre les performances énergétiques demandées par le bureau d’études.
La VMC collective (conduits communs, moteur centralisé) est une partie commune. Les entrées et bouches d’aération dans le logement peuvent être privatives, mais doivent respecter les normes collectives. Une VMC obligatoire suite à une isolation peut être imposée collectivement si elle concerne la salubrité du bâtiment.
Le balcon : la dalle est commune, le revêtement et le garde-corps peuvent être privatifs.
Les gaines techniques sont collectives, même si elles passent dans un appartement.
Les planchers bas sont structurels, donc communs, même s’ils délimitent un lot privatif.
Oui, si l’AG a voté des travaux d’intérêt collectif régulièrement, le syndicat exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage, même sur des parties privatives. Cela est encadré par la loi (art. 9 de la loi de 1965), à condition de ne pas altérer durablement l’usage privatif.
MaPrimeRénov’ Copropriété, jusqu’à 75 % d’aide.
Éco-PTZ copropriété, jusqu’à 20 ans sans intérêts, sans avance de frais.
Ces aides sont disponibles uniquement si les travaux sont votés en AG et commandés par le syndic.